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Contrôles au faciès: la police mise en demeure par une victoire décisive devant la justice française

Date
November 09, 2016
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NEW YORK/PARIS—En frappant d'illégalité les contrôles de police qui ciblent de manière disproportionnée les jeunes d'origine africaine et arabe, la plus haute cour française a rendu aujourd’hui un arrêt qui ouvre la voie à des changements fondamentaux dans les pratiques policières en France.

À Paris, les juges de la Cour de cassation se penchaient sur une série d'affaires dans lesquelles treize jeunes hommes s'étaient plaints d’avoir fait l'objet de contrôles d’identité dits au faciès, c'est-à-dire au seul fondement de leur origine ethnique.

Contestant les arguments avancés par l'État, les juges ont estimé que la législation relative à la non-discrimination devait tout autant s'appliquer aux activités policières qu'aux autres domaines de la vie.

En outre, s'agissant de démontrer que les contrôles et les fouilles sont effectués d'une manière non-discriminatoire, la Cour a formulé des règles de procédure qui font peser sur la police et les autorités de l’État la part du lion de la charge de la preuve.

James A. Goldston, directeur exécutif de l'Open Society Justice Initiative, qui soutient les avocats des treize jeunes hommes, salue cette décision : « Ce jugement représente une victoire majeure, non seulement pour les plaignants, mais aussi pour les nombreuses autres personnes soumises quotidiennement à des contrôles d’identité discriminatoires, des palpations et des fouilles. La police française a hélas résisté jusqu’à présent à toute tentative de mettre en place un enregistrement de ces contrôles, privant ainsi les victimes de tout recours ; à la lumière de ce jugement, cela va devoir changer. »

La Cour a clairement affirmé qu'il suffit aux individus visés par les contrôles d'apporter un commencement de preuve suggérant une discrimination, et que des données statistiques peuvent être recevables dans le cadre d'une telle évaluation. C'est ensuite à l'État, seule partie en capacité de justifier des motifs du contrôle, qu'il revient de prouver que celui-ci était bien fondé sur des critères objectifs et individualisés.

À l'heure actuelle, la police française ne conserve aucune donnée relative à l'appartenance ethnique des individus contrôlés. Aussi longtemps que les autorités françaises ne procéderont pas à un enregistrement des contrôles, par exemple sous la forme de récépissés similaires à ceux utilisés par les forces de police en Angleterre ou ailleurs, l’obligation de preuve à laquelle est tenu l’État restera difficile à satisfaire. En l'absence des informations nécessaires sur les contrôles d’identité effectués par les forces de l’ordre, le risque est alors grand, pour l'État, de perdre systématiquement les actions en justice intentées contre lui.

Lanna Hollo, juriste de l'Initiative Justice basée à Paris, déclare : « Cette décision contraint les autorités françaises à respecter enfin la promesse électorale faite en 2012 par le président Hollande de ‘lutter contre le délit de faciès dans les contrôles d’identité par une procédure respectueuse des citoyens’, notamment en mettant en œuvre les récépissés et en imposant que tout contrôle soit fondé sur des motifs objectifs ».

En l’espèce, les requérants s'appuyaient sur les résultats d'une étude quantitative sur les contrôles d’identité à Paris, réalisée en 2009 par l'Initiative Justice et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Celle-ci avait en effet démontré que les individus identifiés comme « Noirs » et « Nord-Africains » couraient respectivement six et huit fois plus de risque d’être contrôlés que les individus désignés comme "Blancs".

La procédure initiale avait été intentée en avril 2012 par les avocats Slim Ben Achour et Félix de Belloy.

 

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